L’équipe de rédaction du journal Haïastan souhaite apporter une réponse argumentée et élaborée à l’éditorial des Nouvelles d’Arménie du mois de mai rédigé par Ara Toranian, que l’on peut aisément qualifier de pro-Pachinian.
Cher Ara, vous qui avez été pendant toutes ces années un défenseur de la cause arménienne, il n’est pas digne de vous de falsifier ou de relayer de fausses informations sur les évènements qui ont lieu en Arménie, dans le seul but de diaboliser l’image de l’opposition. Il n’est pas non plus digne de quelqu’un qui prône la démocratie, d’empêcher le débat en rédigeant des articles afin de préserver à tout prix l’image d’un gouvernement qui est tout sauf exemplaire, et de ternir celle de l’opposition, en déformant ses déclarations et la réduisant à une poignée « d’anciens » malhonnêtes et opportunistes.
Je vais tenter de vous fournir les réponses et les arguments auxquels vous appelez dans votre article. Et je ne manquerai pas de citer mes sources à chaque fois. Par chance, votre dernier éditorial reprend de manière quasi-exhaustive l’argumentaire mensonger que l’on entend depuis le 9 novembre 2020, depuis que Nikol Pachinian a signé ce que bon nombre considère comme la fin de l’Artsakh et la fin d’une Arménie souveraine.
Je tâcherai donc de reprendre, point par point, vos arguments afin de mettre en évidence la mauvaise foi des supporters de Pachinian et la manipulation dont ils font l’objet.
« La « légitimité » de Pachinian, les forces de l’ancien régime la contestent en permanence depuis l’accord du cessez-le-feu du 9 novembre 2020, une défaite dont elles espéraient se nourrir pour revenir en force. »
Considérer Nikol Pachinian comme illégitime est de loin compréhensible quand il a été rendu public qu’il a signé un accord de cessez-le-feu qui cédait tout bonnement à l’Azerbaïdjan les régions de Karvachar, Berdzor et Aghdam, défendues et reprises par nos soldats à l’issue de 30 années de lutte et 3 guerres.
Nous laisserons à d’autres l’analyse des décisions militaires prises par le commandement du ministère de la Défense, mais nous retiendrons les mensonges du gouvernement à son peuple, lui faisant croire que les combats continuaient alors que l’accord était en réalité, déjà signé. Alors que l’Azerbaïdjan annonçait la « libération » de Shushi le 8 novembre et que des vidéos d’Aliyev à l’intérieur de la ville circulaient, Pachinian annonçait le 9 novembre à 16h12 sur sa page Facebook que les combats pour la ville continuaient.
Ceux qui suivaient les nouvelles se rappelleront bien que le soir même, l’accord entier avait fuité sur les chaînes Telegram azéries, puis dans leurs journaux. Et c’est seulement le lendemain que Nikol annonçait enfin la signature de l’accord signé déjà depuis plusieurs jours.
Non, les « forces de l’ancien régime » n’ont jamais cherché à se nourrir de cette tragédie pour revenir au pouvoir. Au lendemain de la signature, pour un total de 17 partis qui ont demandé la démission immédiate de Nikol Pachinian pour cet acte, vous n’en retenez que 2 : la FRA et le parti républicain d’Arménie. Les autres n’ont pas d’importance ?
Soit. Vous ne les portez pas dans votre cœur, vous avez des divergences politiques, mais pourquoi déformer la vérité ? Le 27 septembre 2020, premier jour de cette guerre tragique, la FRA faisait une déclaration dans laquelle elle affirmait : « Nous mettons de côté tous les désaccords politiques, nous sommes un soldat de l’armée aux côtés de l’État. » https://www.arfd.am/news/30533/
Le même jour, en plus d’avoir envoyé deux bataillons de volontaires, réuni 14 partis d’opposition avec pour unique but de mettre les divergences politiques de côté et de faire une déclaration annonçant le soutien à l’Etat (https://www.arfd.am/news/30535/) ; la FRA, à travers son représentant Ishkhan Saghatelyan, a contacté Nikol Pachinian pour lui assurer de son soutien pendant la guerre, en convenant ensemble de dénoncer l’agression militaire de l’Azerbaïdjan au monde via les bureaux du Hay Tad. https://haiastan.org/new/?p=1643
Drôles d’agissements pour un parti que beaucoup essayent de dépeindre comme celui qui attendait la capitulation pour revenir en politique, non ?
« Elles [les forces de l’ancien régime] récidivent aujourd’hui en réclamant encore la démission du Premier ministre. Comme s’il n’avait pas déjà remis en jeu son mandat, il y a moins de dix mois, avec le déclenchement de nouvelles élections qui sont, elles-mêmes, intervenues un an et demi après le suffrage du 9 décembre 2018 ! »
Cela n’avait pas l’air de déranger grand monde quand Nikol Pachinian mettait le pays à l’arrêt en 2018, et imposait à l’Assemblée son élection en tant que premier ministre, en excluant tout compromis avec les autorités. « Si je ne suis pas élu premier ministre, il n’y aura pas du tout de premier ministre en Arménie », disait-il sur la place de la République. https://bit.ly/3wtYyLF. À l’époque, réclamer la démission d’un président, manifester dans la rue et créer un mouvement de « révolution » et de contestation relevait encore, à vos yeux, de la démocratie.
Au contraire, en ce qui concerne le mouvement de résistance qui prend de l’ampleur en ce moment en Arménie, vous omettez systématiquement de rappeler les raisons de ces protestations envers le gouvernement Pachinian et la raison de la demande de sa démission.
Ce n’est pas comme si en l’espace de ces dix mois, le gouvernement arménien avait annoncé vouloir normaliser les relations sans préconditions avec la Turquie, et vouloir signer un traité de paix avec l’Azerbaïdjan avec en bonus reconnaissance de son intégrité territoriale (Et oui, cela comprend l’Artsakh). https://bit.ly/39jXSQS
Non ce ne sont que politique et querelles pour le siège, rien à voir avec la crise en Artsakh et au Syunik, ni avec la défaillance d’un gouvernement qui multiplie les déclarations en direction de la normalisation et de la paix avec ses ennemis, alors que son peuple vit sous les tirs azéris à seulement quelques centaines de mètres.
Rien à voir non plus avec les pourparlers de paix avec l’Azerbaïdjan qui est responsable de la crise du gaz en Artsakh, d’avancées en territoire arménien et du grignotage des frontières arméniennes, de condamnations démesurées de plusieurs Arméniens à l’issue de procès fictifs ; ni avec la visite d’Ararat Mirzoyan tout sourire en Turquie, aux côtés d’un Mevlut Cavusoglu, qui arbore quelques jours plus tard, cyniquement, le signe des Loup gris devant les Arméniens d’Uruguay.
Rien à voir enfin avec les insultes d’Alen Simonian envers les arméniens de Chypre (https://bit.ly/3LdjewA), avec ses achats répétés de voitures de luxes (https://hetq.am/en/article/138230), et pour rester dans ce thème, avec le meurtre d’une jeune femme enceinte de 29 ans brutalement renversée par le cortège du premier ministre qui a décidé de terroriser le pays à chaque fois qu’il se déplace depuis les dernières élections. https://bit.ly/3LaZslt.
Non ce ne sont pas des abus de pouvoir. Nikol n’est pas un ancien, il n’est pas autoritaire, il n’a jamais fait campagne avec Levon Ter-Petrossian, ni siégé dans l’Assemblée avant 2018, cela ne s’applique donc pas à lui.
« Comment ne pas s’inquiéter de l’incapacité de cette opposition à porter le moindre regard critique sur sa propre expérience du pouvoir, à accepter le verdict des urnes, et à se renouveler ? »
Encore une fois, Ara Toranian, vous refusez de citer les propositions de ce mouvement d’opposition. Serait-ce par simple ignorance du programme de l’opposition ? Après tout, ce ne sont que les pions de Kotcharian.
S’il y a bien une insulte à la démocratie, elle est là. De diaboliser des députés de tous bords politiques, qui ont formé une alliance pendant les élections pour sauver la patrie de sa turquification non seulement pressentie, mais constatée un an et demi après la signature de novembre 2020.
Vous voulez parler d’idées, pourquoi ne parlez vous pas du programme de 24 pages, 178 points de Hayastan Dashinq (Alliance Arménie) lors des dernières élections ? Est-ce parce que Nikol n’a pas daigné émettre une seule proposition et a passé sa campagne à jouer la carte des « méchants anciens », en insultant l’Arménien qui oserait voter pour eux, en brandissant des marteaux et en menaçant ses opposants ?
Vous qui parliez de démagogie, pourquoi ne pas commenter la promesse de Nikol Pachinian d’envoyer son fils en échange des prisonniers de guerre, qui selon ses dires, attendraient bien encore deux mois et le pardonneraient de ne pas les faire revenir tout de suite. Avons-nous des nouvelles des prisonniers ? Hormis qu’ils sont injustement condamnés, torturés et emprisonnés dans des conditions inhumaines en Azerbaïdjan…
En ce qui concerne le programme de l’alliance Arménie, vous pourriez penser qu’il ne parle que de guerre ou de Nikol.
En réalité, chers lecteurs, ses onze premiers points parlent de la paix. Viennent ensuite des dizaines de propositions réfléchies sur la géopolitique, la sécurité, la stabilité, l’économie, le social, le local, la culture, le digital, l’éducation, la jeunesse, le sport, l’agriculture, la santé, les régions, le transport, etc.
J’ai choisi quelques points qui à mon sens montrent le sérieux des idées de l’alliance, libre à vous d’aller le lire entièrement et de voir les autres.
« 34. Nous rétablirons en priorité les ministères de l’Agriculture et de la Culture.
36. Nous élaborerons de nouveaux programmes de coopération et de dialogue entre l’Arménie et la diaspora, nous réexaminerons les restrictions concernant la participation des personnes ayant une double nationalité à l’administration de la République et nous introduirons de nouveaux mécanismes de coopération.
41. Nous faciliterons l’exercice de la démocratie participative et directe (référendums, scrutins nationaux, etc.), en tant que moyen efficace d’exprimer la volonté du peuple.
50. Le potentiel des femmes sera utilisé efficacement dans les différentes sphères de la vie sociale. Un mécanisme national sera adopté pour atteindre une représentation équilibrée des femmes à tous les niveaux de gouvernement.
120. Nous assurerons une éducation de haute qualité dans tout le pays, en éliminant l’optimisation des écoles dans les communautés de montagne, d’altitude et frontalières. L’accessibilité de l’enseignement préscolaire sera portée à 90-95%.
147. Le principe « aucun citoyen sans traitement approprié » sera appliqué. En effet, la gratuité des soins pour la population sera assurée sur la base d’un paquet minimum de soins de base. Les problèmes de santé ne doivent pas conduire à l’appauvrissement des citoyens ou à la détérioration de leur situation sociale. La question du plein accès aux services de santé pour les groupes socialement vulnérables sera résolue. »
Pour lire le programme dans son intégralité : https://xn--y9afw8bd4f.xn--y9a3aq/sites/default/files/2021-06/program-eng_1.pdf
Espérons qu’il s’agissait plutôt d’ignorance que de mauvaise foi, il n’est jamais trop tard pour se faire un avis sincère sur cette opposition et son programme, en ayant les bons outils face à soi.
Je finirai cette partie en disant qu’en dehors des têtes d’affiches, les personnalités inscrites sur les listes de l’opposition sont en grande partie des nouveaux. Des jeunes brillants, des docteurs, des juristes ; beaucoup d’autres professions sont également représentées à travers des personnes nommées pour leurs compétences et leur expertise dans différents domaines.
« Jouant sur tous les ressorts du nationalisme, les protestataires ne reculent devant aucune violence verbale, taxant encore et toujours le Premier ministre de « traîtrise ». »
J’avoue ne pas comprendre ce que vous reprochez au nationalisme arménien qui a inspiré les libérateurs de l’Artsakh lors de la première guerre. Ne sommes-nous pas aujourd’hui contraints, bien sûr sans céder à l’extrémisme et en gardant la raison, de tirer des enseignements de ce nationalisme qui a tant appris à l’armée arménienne et à la patrie aujourd’hui menacée ?
À vrai dire, je ne considérerai même pas la reprise de quelques chansons patriotiques et la volonté de ne pas faire la paix avec nos bourreaux de toujours comme du nationalisme, mais plutôt comme de la rationalité face à l’aboutissement du panturquisme et de ses conséquences dévastatrices.
Visiblement vous reprochez l’opposition d’accuser Pashinyan de traîtrise, je passerai. Considérant que les lecteurs comprendront certainement en lisant l’article que ce n’est même pas assez fort pour la personne de Nikol.
Enfin que dire, ne trouver que des violences verbales à reprocher au mouvement en Arménie est ironique quand on lit tous les maux que vous lui accordez. De l’autre côté, c’est à dire des bérets rouges et des forces de l’ordre guidées par le gouvernement, ce ne sont pas des violences verbales mais bien physiques. Des centaines d’arrestations par jour, plus violentes et arbitraires les unes que les autres, avec un pic à 417 arrestations le 17 mai dernier dont des femmes, des mineurs et des personnes âgées.
On retiendra simplement qu’un policier a cassé le bras d’un homme âgé et qu’une femme de 77 ans s’est retrouvée avec une fracture à l’humérus gauche.
« Avant de critiquer ceux qui se sont insurgés en 2018 contre cette déliquescence morale, cet aveuglement politique, et qui ont payé le prix de son héritage au moment de la guerre, ces anciens dirigeants ne seraient-ils pas bien inspirés de balayer devant leur porte ? »
L’opposition est responsable au moment de la guerre, l’est-elle aussi pour le processus de normalisation ou le traité de paix ? Espérons qu’elle ne sera pas tenue responsable également de ces signatures qui arrivent et qui auront pour conséquence la cession de nos régions à l’économie turque et raviveront les revendications territoriales d’Aliyev.
« Nos terres natales sont le Zangezur (Syunik), Goycha (Sevan) et Iravan (Erevan). Nous reviendrons certainement », avait-il dit.
Encore une fois, en partant du principe ne que nous sommes, ni vous ni moi, des militaires, ni des experts en la matière, nous ne pouvons pas juger de la responsabilité liée à la décision des retraites « stratégiques » pendant la guerre. C’est en revanche le cas des vétérans des trois guerres qui ont témoigné sur la Place de France à Erevan, et pas dans votre sens.
Comment pouvez-vous fermer les yeux sur les dizaines de décisions prises, et les déclarations scandaleuses du pouvoir depuis la fin de la guerre. Parce qu’un premier ministre qui a les pleins pouvoirs, qui a envoyé le service de sécurité nationale chercher ses opposants politiques à plusieurs reprises, n’est toujours pas assez puissant à vos yeux pour endosser la responsabilité de ses erreurs ?
Que l’Arménien sorte de cette rhétorique du « nakhkin » responsable de tous les maux de l’Arménie, cela nous permettra de nous mettre à la page sur les enjeux actuels.
« Enfin, que penser du contenu politique des discours de ces « opposants », […] qui en appellent à cette « solidarité » dont ils se sont tant moqués en écrasant sans vergogne le peuple qui a fini par les chasser, qui préconisent la « stabilité », après avoir essayé de la maintenir en tirant sur la foule le 1er mars 2008 ? »
Pour ce qui est du 1er mars 2008, beaucoup semblent oublier que Nikol Pachinian était recherché, en fuite, pour des faits en lien avec ces évènements. Il est fort probable que vous pensiez que c’était de l’autoritarisme de la part des Républicains, car c’était un opposant politique, libre à vous. Mais, qu’avez-vous à dire sur ces extraits de vidéos des manifestations, où Nikol dit à la foule de se déchainer : « Nous devons libérer ce pays des ordures de gharabaghtsi (artsakhiotes) » ? https://bit.ly/38zggFq
Et quid des appels téléphoniques avec Alexander Arzumanyan, chef de la campagne de Levon Ter-Petrossian, où ils se réjouissent des voitures brulées (avec des cocktails molotov), des magasins pillés, traitant les manifestants de coquilles vides et leur disant de continuer bien qu’ils savaient qu’il y avait des morts ? https://www.youtube.com/watch?v=4A33-rgrGAs&t=471s
Afin de rester dans le thème de son comportement répugnant, revoici Nikol Pachinian, avant la révolution de 2018, s’en prenant à une jeune policière en lui disant « Savez-vous qui je suis ? » puis en la suivant jusque chez elle avec tout son quartier en l’agressant verbalement. Homme du peuple. https://bit.ly/3LdA8v5
« La nation est saturée de démagogie. (…) La nation a besoin de réflexion, de solution, de dialogue. Il y a des institutions pour cela, et en premier lieu le Parlement. »
Vous semblez ne pas savoir que toute tentative de dialogue engendrée par l’opposition a été rejetée par le bloc majoritaire. A chaque fois qu’une annonce trahissant les intérêts arméniens était faite par le gouvernement, un texte était rédigé pour nous protéger, systématiquement refusé par la majorité. Mais pourquoi ? Paradoxe ou non, ceux qui sont venus en 2018 sont devenus ceux qu’ils critiquaient le plus. Ces gens-là n’écoutent pas l’avis de l’opposition, car ils sont là pour faire voter les décisions tragiques du premier ministre omniscient.
Tant qu’à faire, autant parler du fait que des oligarques comme Grzo sont aussi présents dans l’assemblée sous la bannière du Contrat Civil, mais aussi des incompétents notoires comme le beau-frère de Nikol Pachinian qui siège sans expérience en tant que député…
C’est léger comme renouvellement et nouveau modèle de démocratie, non ?
« Heureusement. Il est temps de réaliser que les choses ont bougé. Et que la seule révolution qui vaille exige un changement de modèle, le passage d’une opposition destructive et stérile, d’un front du refus permanent, à une opposition constructive dotée d’une vraie capacité de proposition. »
Pour finir, je vous redirigerai simplement vers le programme de Hayastan Dashinq, qui à mon sens est le symbole de construction que vous recherchez. Les propositions sont bien là, prêtes à être mises en place quand celui qui tient la souveraineté de l’Arménie par une corde très fine décidera soit de s’en aller, soit de travailler pour les intérêts des Arméniens.
La liste que j’ai fournie des erreurs diplomatiques et autres déclarations ou actions honteuses de Nikol et de son gouvernement aurait pu être encore très longue, en entrant par exemple dans dans le détail des localités cédées à l’Azerbaïdjan, ou encore de la route interétatique Goris-Kapan passée sous contrôle azéri (créant un problème toujours insolvable car la route alternative n’est pas assez grande pour les camions iraniens), etc.
Mais de tous les reproches que j’ai à lui faire, je n’en retiendrai qu’un seul.
Depuis la fin de la guerre, Nikol Pachinian n’est pas retourné en Artsakh, pas même à l’anniversaire de la guerre pour un hommage. C’est normal, me direz-vous, le corridor est trop tendu, il y a des Azéris, des Russes, etc.
Chers lecteurs, aucun des représentants du gouvernement Pachinian, aucun député de cette majorité, n’a mis un pied en Artsakh depuis la guerre. Aucun.
Au contraire, plusieurs députés de l’opposition s’y sont rendus plusieurs fois dans la même période pour affirmer leur soutien à la population. Cette population et cet État complètement délaissés, nous ne le savons que trop bien, après nos trois visites sur place post-guerre pendant nos projets humanitaires et notre projet pour le gaz.
Alors pour vous en diaspora qui lirez cet article, qui avez vu notre union pendant la guerre, tous derrière cette terre qui symbolisait notre victoire, notre survie, et notre résistance. Cela ne vous fait-il rien de savoir que notre patrie la délaisse et la laisse glisser dans les mains des Azéris sans broncher ?
De savoir que le seul garant de la vie de ses 110.000 habitants, est un contingent russe qui n’a même pas été accepté par la partie azérie ?
De savoir, permettez-moi l’ironie, que Valérie Pécresse s’y soit rendue et pas un seul député du Contrat Civil ?
L’Artsakh résonne en nous tous, nous devons nous battre pour elle, et cela signifie soutenir le mouvement de résistance contre un gouvernement qui ne veut pas assurer sa survie et a décidé de tirer un trait dessus en la reconnaissant comme région azerbaïdjanaise. N’hésitez-pas à vous documenter sur le programme de l’opposition, sur les prises de paroles d’intellectuels, de vétérans, de blessés de guerre, qui se succèdent chaques jours sur la Place de France.
Je vous laisse avec une citation très symbolique, extraite de l’article de mon amie Méliné, avec qui nous sommes allés en Artsakh pour le Projet Yerguir 2021 :
Quelques heures auparavant, devant les ruines du trépas de son frère, notre « enguerouhie » a eu cette autre phrase : « Արցախը հայութեան փրկութիւնն է ։ ». C’est vrai. Et je préciserai : en Arménie et en diaspora.
L’Artsakh, terre de douleur, est aussi terre de vérité. Peut-être la dernière. En tous cas, elle porte la dernière vérité pour laquelle le peuple arménien doit encore se battre et se relever.
Կոլյա Ավետիսյան
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