Discours prononcé par Arthur Njteh Karakavorian, président de la FRA Nor Seround, à l’occasion de la rencontre organisée avec les mouvements de jeunesse des partis politiques français :
Mesdames et Messieurs,
Cher Hovannes Gevorkian, représentant de l’Artsakh en France,
Chers représentants des jeunesses des partis politiques,
Chers camarades Berdj et Anahit, membres du Comité Central de la FRA pour l’Europe occidentale,
Chers camarades de la FRA Nor Seround, chers amis,
Je tiens d’abord à vous exprimer ma profonde gratitude pour votre présence ce soir à l’occasion de ce dîner organisé par la FRA Nor Seround. Au nom de notre Bureau National, je vous remercie sincèrement.
Cette soirée est avant tout une occasion de rencontre, de dialogue, d’échange, d’unité et, surtout, d’engagement. Malgré les récentes tensions et turbulences de la vie politique française, nous sommes ici unis pour transmettre un message fort et clair : une condamnation sans équivoque des tentatives d’ingérence et des exactions menées par les autorités et les services de renseignement turcs et azerbaïdjanais sur le sol français, menaçant la souveraineté de notre belle République. Ce soir, vous exprimez également une solidarité indéfectible avec le peuple arménien, et en particulier avec les Arméniens d’Artsakh, qui ont subi un nouveau génocide, une épuration ethnique, rappelant tragiquement 1915.
En 2023, des centaines d’Arméniens ont été exécutés sommairement, des bâtiments civils ont été ciblés, et même le centre de la francophonie Paul Éluard de Stepanakert ainsi que le centre culturel Aznavour – fréquentés par de nombreux enfants – ont été frappés par des bombardements incessants. Cette agression est une suite au blocus du corridor de Latchin, unique passage vital pour les 120 000 habitants de l’Artsakh. Avant le siège affreux et inhumain imposé par l’Azerbaïdjan pendant plus de huit mois, cette route – surnommée « la route de la vie » – permettait l’acheminement de vivres et de soins essentiels. C’est aussi par ce corridor que des personnalités politiques, dont le premier ministre Michel Barnier et le ministre de l’Intérieur actuel, se sont rendues en Artsakh. Par cette même route, la FRA Nor Seround a pu, après la guerre de 2020, venir en aide aux enfants et aux orphelins, en organisant des réveillons et des camps d’été, en rénovant des écoles et en distribuant du matériel scolaire, à quelques dizaines de mètres seulement des soldats azerbaïdjanais. Mon camarade Sacha vous exposera tout à l’heure en détail ces projets de solidarité.
Le projet qui restera sans doute gravé dans ma mémoire est celui du gaz. C’était une idée folle, atypique, que j’avais moi-même qualifiée d’impossible au début. Fin mars 2021, alors qu’il neigeait encore en Artsakh, l’Azerbaïdjan avait coupé l’arrivée de gaz, et nous savions que des enfants mouraient de pneumonie à cause du froid. Impuissants au départ, nous avons eu une idée aussi audacieuse que risquée. En dix jours, grâce à la confiance et au soutien de nos sympathisants, nous avons réuni 20 000 euros et distribué 650 bonbonnes de gaz dans les villages les plus isolés et aux familles les plus vulnérables. Malheureusement, ces efforts n’ont pas suffi à éviter le pire.
En septembre 2023, 120 000 Arméniens ont été déportés de l’Artsakh occupé, exilés de leur terre ancestrale. Pour la première fois de l’histoire, l’Artsakh – le Haut-Karabagh – est vidé de sa population arménienne. Pendant que le monde regarde ailleurs, une dictature anéantit une démocratie, et un silence assourdissant règne autour de ces atrocités, notamment autour des prisonniers politiques arméniens détenus illégalement à Bakou, qui subissent des tortures insoutenables.
Aujourd’hui, la haine du clan Aliyev ne se limite plus aux Arméniens ; elle s’étend aussi à la France et aux Français. Il est essentiel que nous dénoncions, ensemble et ce soir, l’ingérence turco-azerbaïdjanaise croissante en France, une interférence dangereuse qui vise à déformer la vérité, à étouffer les voix des opprimés et à ternir l’image de la France.
Nous avons tous vu les conséquences tragiques de cette influence, avec l’assassinat de trois militantes kurdes à Paris en 2013, perpétré par un ultranationaliste turc formé par les services secrets turcs à Ankara. Les services de renseignement azerbaïdjanais agissent également en France, éliminant brutalement leurs propres opposants au régime Aliyev. Récemment, un opposant a été assassiné en octobre à Mulhouse, tandis que d’autres, comme Mirzalie, ne survivent que grâce à la protection policière française.
Les réseaux d’influence turcs et azerbaïdjanais ne menacent pas seulement nos libertés en France métropolitaine ; ils tentent aussi de semer la division dans nos territoires d’outre-mer, notamment en Nouvelle-Calédonie, où leurs actions de déstabilisation ont coûté la vie à plusieurs de nos militaires français.
Chers amis, disons-le clairement : l’Azerbaïdjan finance et arme des séparatistes, manipulés par leurs services de renseignement, qui menacent la cohésion de notre pays et l’intégrité de l’État.
L’impunité de ces agissements est alarmante pour la France et particulièrement pour les 500 000 Arméniens qui y résident.
Quant aux manœuvres turques, l’inauguration récente d’une statue d’Atatürk à Épinay-sur-Seine, soutenue par le maire, symbolise le cynisme politique de certains élus. Au-delà des clivages partisans, ce geste est une insulte aux valeurs républicaines et à la mémoire des Grecs, Kurdes et Arméniens persécutés sous le régime d’Atatürk – un personnage qu’Hitler lui-même décrivait comme « le plus grand homme du siècle ».
Heureusement, le ministère de l’Intérieur est conscient de la gravité de ces ingérences. En 2020, des ultranationalistes turcs ont défilé dans les rues de Lyon, menaçant les Français d’origine arménienne. Ce climat de haine a conduit à la dissolution des Loups Gris en France.
Je tiens à préciser que notre problème ne concerne pas la communauté turque de France ni les Français d’origine turco-azerbaïdjanaise, tant qu’ils respectent les lois de la République. Nous dénonçons l’instrumentalisation d’État dont certains d’entre eux sont victimes et rejetons la propagande négationniste d’Ankara.
Chers amis, ce dîner est aussi l’occasion de demander au Quai d’Orsay de porter notre voix à la COP29 qui se tiendra le 11 novembre à Bakou, en s’engageant fermement pour la libération des prisonniers de guerre arméniens. Ce combat pour la justice doit être une priorité diplomatique.
Je vous remercie pour votre détermination à résister aux tentatives d’intimidation et à refuser les « offres » de la diplomatie du caviar. Bien que les pétrodollars du clan Aliyev aveuglent certains, je n’ai aucun doute quant à votre engagement et votre loyauté envers la France.
Votre soutien au peuple arménien est essentiel. Les défis sont loin d’être terminés : l’Azerbaïdjan menace aujourd’hui l’intégrité de l’Arménie, occupant plus de 220 km² de son territoire souverain dans la région du Syunik, au sud de l’Arménie – une superficie équivalente à deux fois celle de Paris. Notre engagement commun fera la différence. L’avenir et la liberté de l’Artsakh, ainsi que le retour des 120 000 Arméniens déplacés, dépendent de notre unité face à l’oppression.
Enfin, je vous invite à soutenir le communiqué que nous avons préparé ce soir, que mon ami Alex Solomonyan vous exposera plus tard. En le cosignant, vous renforcerez la voix puissante de la jeunesse française pour la vérité et la justice.
Merci encore pour votre soutien et votre solidarité indéfectible. Ensemble, passons des paroles aux actes.
Vive l’Arménie et l’Artsakh,
Vive la fraternité franco-arménienne,
Vive la France !
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