Hagop Ochagan

Hagop Ochagan, de son vrai nom Hagop Kufédjian, né le 9 décembre 1883 à Söylöz (Empire ottoman) et mort le 17 février 1948 à Alep (Syrie), est l’un des écrivains arméniens les plus influents du XXe siècle, considéré comme le père des auteurs et intellectuels arméniens les plus importants de la diaspora au XXsiècle et connu pour ses œuvres littéraires complexes et raffinés qui dépeignent la vie arménienne avant et après le génocide de 1915, faisant recours à un registre de langue soutenu et formel. Ayant échappé à la rafle des intellectuels arménien du 24 avril 1915, Ochagan consacre sa vie à la préservation de la mémoire collective de son peuple à travers ses écrits. Après avoir échappé aux massacres, il s’exile d’abord en Bulgarie, revenant quatre ans plus tard à Constantinople pour enseigner la littérature au Lycée arménien Guétronagan. On le retrouve en Bulgarie en 1922 et en 1924 au Caire. Il est décédé lors d’une visite à Alep, le 17 février 1948, à la veille d’une visite prévue à Deir ez-Zor, où des centaines de milliers d’Arméniens ont péri pendant le génocide arménien.

Hagop Ochagan commence ses études au séminaire arménien d’Armache, où il développe un intérêt précoce pour la littérature et les langues. Enfui du séminaire, en 1900, il devient instituteur de campagne jusqu’en 1908. En 1902, ses élèves publient à son insu sa première nouvelle, La première larme, qui ouvrira le recueil Les Humbles (1920). En 1911, il séjourne à Malaga chez son ami écrivain Ardachès Haroutunian, dans la bibliothèque duquel il découvre les romanciers russes, particulièrement Dostoïevski qu’il érigera en modèle. Il collabore à la revue Navasart (1913) de Daniel Varoujan. Avec ce dernier, Gostan Zarian et Levon Shant, il fonde en 1914 la revue Méhian, qui relate les origines et les mythes fondateurs de l’identité arménienne grâce à l’art et à la littérature. Ayant survécu à la tragédie du génocide des Arméniens, cet événement tragique influence profondément son œuvre et sa vision du monde. Ochagan arrive à Constantinople en 1919, où il enseigne la littérature au Lycée arménien Guétronagan. Ochagan finit par quitter définitivement la ville pour se rendre en Bulgarie en 1922 et en 1924 au Caire, enseignant dans divers collèges et lycées arméniens. Après la guerre, il continue à se former de manière autodidacte, étudiant les littératures européennes, russes et françaises, tout en enseignant et en écrivant dans des écoles arméniennes à travers le Moyen-Orient.

Hagop Ochagan est un auteur prolifique dont les œuvres explorent les complexités de l’identité arménienne, souvent à travers des récits profondément enracinés dans les expériences collectives et individuelles de son peuple. Parmi ses ouvrages les plus marquants, on peut citer :

  • Les Humbles (Խոնարհները, 1920) : une représentation poignante des vies des déclassés des villages et les bannis de la société arménienne ottomane. Ochagan y dépeint avec une grande empathie les luttes quotidiennes des gens ordinaires, explorant les thèmes de l’injustice sociale, de la résilience et de la dignité humaine.
  • Paralipomènes (Մնացորդաց, 1931-1934) : Immense fresque romanesque inachevée dans laquelle Ochagan retrace la vie des survivants du génocide, explorant les traumatismes, les souvenirs et la quête d’identité dans un monde en ruines.
  • Panorama de la Littérature arménienne occidentale (Համապատկեր արեւմտահայ գրականութեան, 1945) : Cet ouvrage est une analyse critique et exhaustive de la littérature arménienne occidentale, où Ochagan explore les contributions de divers écrivains arméniens à la culture littéraire. À travers cet ouvrage, Ochagan se pose en historien de la littérature, mais aussi en critique littéraire, offrant des explications suffisamment profondes sur les courants, les thèmes et les évolutions de la littérature arménienne.

Le style de rédaction d’Ochagan se distingue par une prose riche et complexe, souvent teintée de mélancolie et de réflexion philosophique. Il utilise fréquemment des techniques narratives non linéaires, mêlant réalisme, symbolisme et une profonde analyse psychologique de ses personnages. Ses œuvres sont marquées par un souci constant de mémoire, une exploration des traumatismes historiques et une quête pour comprendre l’âme arménienne dans toute sa profondeur et sa diversité. Ochagan reste une figure emblématique de la littérature arménienne, offrant à ses lecteurs un miroir dans lequel se reflètent les espoirs, les souffrances et les aspirations d’un peuple.